Attention à la tête de bébé
Nicolas Kamennoff (promo 2007) et Thibaut Royer (promo 2012), tous deux tech’mentors du Hub Innovation de l’école, ont participé au challenge d’innovation New Health, pour ne pas dire hackathon, dont on vous avait annoncé la tenue mi-juin 2015. Là-bas, ils y ont raflé le grand prix de l’innovation de même que le prix de la prévention, avec le POC d’une appli qui s’appelle aujourd’hui Bebocap. Elle est destinée à prévenir les malformations crâniennes des nourrissons et des bébés.
What health ?
À cet hackathon, Thibaut et Nicolas ont formé équipe avec un designer spécialisé, Matthieu Robert et Federico di Rocco, neurochirugien, référence dans le domaine de de la plagiocéphalie en France. Ce qui n’était qu’un projet en juin de l’an dernier est en passe de se concrétiser en appli mobile grand public, en beta version pour commencer.
Une ministre à la Villette
On en parle précisément avec Nicolas et Thibaut qui viennent par ailleurs de présenter Bebocap à la Cité des Sciences et de l’Industrie de Paris ce samedi 23 janvier, à l’occasion de la Journée Nationale de l’innovation en santé, où New Health avait évidemment sa place attitrée. Ce week-end et point d’orgue d’un cycle de 18 mois consacré à l’innovation et l’e-santé a été visité par Marisol Touraine ministre des Affaires sociales, de la Santé et de Droits des femmes samedi matin.
Le challenge innovation New Health de juin
Comme le rappelle Nicolas, « l’idée vient de Federico (…), il est aujourd’hui responsable de service aux Hospices Civils de Lyon, il reçoit des familles toutes les semaines où il voit des bébés qui ne vont pas bien, avec des déformations assez sévères. Du coup, lui est venue cette idée de prévention. C’est notre comité scientifique à lui tout seul… »
Prévenir
« Bebocap, tient à souligner Thibaut, est un système d’observation et pas un dispositif médical, elle n’a pas prétention à l’être. Elle permet de voir et de suivre le problème le plus tôt possible. Il s’agit de rassurer les parents ou de les guider vers des pédiatres pour prendre le problème le plus tôt possible. Plus tôt on a conscience de ce problème, en cette première année où le crâne du bébé est hyper souple, plus tôt on peut agir et y remédier ».
Les risques d’une malformation du crâne
Pour parler clair et Nicolas sait le faire, « le premier risque est esthétique, un risque qui peut être très prononcé. Les déformations peuvent aller jusqu’à impacter la forme du front, si ce n’est avoir la tête de travers. Passé une certain seuil de gravité, il est recommandé d’appliquer des traitements et dans les cas les plus graves, on procède à une opération, où l’on casse la boîte crânienne pour remettre les choses en place si le crâne est figé et qu’il est trop déformé parce qu’après, on peut avoir des problèmes de développement de l’enfant : le cerveau n’a plus assez de place, les oreilles sont décalées, ce qui impacte le quotidien de l’enfant… ».
Profils parentaux
Thibaut rebondit et distingue 2 profils de parents : « tu as les parents qui sont naturellement stressés et qui le sont encore plus sur ce genre de questions. Les autres sont à l’opposé – « c’est pas grave, ça va se remettre tout seul, tout va bien »… L’idée c’est, via l’outil de prévention qu’est Bebocap, d’amener les parents qui s’en fichent un peu à une meilleure prise de conscience et ceux qui stressent à mort, de les rassurer à partir d’une observation bien plus fine qu’à l’œil nu. Essayer de trouver un juste milieu entre les 2 profils, pour résumer ».
Bebocap, mode d’emploi
« Tu ouvres l’appli, tu prends une photo de haut du crâne du bébé », décrit Nicolas. Thibaut poursuit : « l’appli te donne une mire et tu mets la tête du bébé dedans un peu comme un photomaton, avec l’indication du nez et des oreilles pour donner une première orientation ». « Ensuite, reprend Nicolas, notre algorithme calcule des scores de symétrie et l’appli affiche les résultats. Ces « scores » sont donnés pour faire savoir s’il y a un problème évident, ou léger. À partir d’un certain seuil, elle envoie un message disant en l’espèce « n’hésitez pas à aller voir votre pédiatre », par exemple, ou « parlez-en au prochain rdv »… »
Le monsieur te dit
« Je préfère répéter, avoue Thibaut, que l’on ne substitue pas du tout au diagnostic, le message Bebocap délivré à la suite des résultats sera plus ou moins pressant mais on ne dira jamais non plus : « pas besoin d’y aller ». Le seul habilité à établir un diagnostic, c’est le pédiatre ».
La perpendiculaire des oreilles
« La mesure des oreilles est une première symétrie facile à faire, reprend Nicolas, on regarde si la perpendiculaire est plus ou moins bonne, là on sait tout de suite si la déformation est lourde au point de déplacer l’axe des oreilles, ou pas… Sans parler de déformation complète, les scores sur Bebocap permettent justement de voir et constater un côté un peu plat ou l’arrière de la tête aussi ».
Alerte coussins
« Un arrière de tête plat, continue-t-il, est un cas qui se retrouve souvent avec ces coussins vendus pour soi-disant prévenir ce genre de déformations du crâne alors qu’ils bloquent la tête du nourrisson qui est donc sur le dos et qui ne peut pas bouger sa tête vers la droite ou la gauche… ».
De fil en aiguille
D’après lui, « on était parti sur l’idée de continuer à développer le projet après le hackathon parce que c’est un projet qui nous intéresse. Maintenant, on voit pas mal de gens qui nous incitent à partir sur le côté start-up. C’est vrai qu’on a encore pas mal de boulot devant nous, pour les versions finales comme sur l’algorithme. Or, pour faire vivre le projet, il devient nécessaire de trouver des financements… ».
One shot ou suivi
« Ce qui va sortir d’abord, c’est une appli gratuite pour sensibiliser les parents. Il va y avoir les parents avec un bébé sans aucun problème de ce type et pour lesquels cette version sera donc amplement suffisante. En revanche, pour les autres, avoir une application de suivi est pertinent et peut nous permettre de faire payer justement ce suivi, pour juste continuer le développement et travailler à d’autres extensions au projet, notamment un « video baby phone »… ».
Extensions de l’application
« Via les nombreux retours à la Cité des Sciences, on a d’autres idées encore, notamment grâce aux kiné. Eux aussi voient des nourrissons, pour les bronchiolites par exemple : ils ont encore des règles à manchette pour faire de la prévention alors qu’avec une appli comme la nôtre, ils pourraient avoir des mesures plus précises ».
Feedbacks utilisateurs
« On a vu aussi de potentiels futurs parents qui avaient l’air intéressés et d’ailleurs, la plupart de leurs questions se divisaient en deux thèmes : l’utilisation des données et l’aspect trop alarmiste. Mais notre volonté, c’est de montrer sans démontrer avec des choses trash. Ce que l’on souhaite, c’est faire de la prévention, pas de l’alarmisme ». Exposer, pas exhiber.