Niels, un Ancien parti à Masdar City
Niels Freier (Epitech promo 2011) était il n’y a pas si longtemps encore un des tech’ mentors de l’Epitech Innovation Hub. Aujourd’hui il travaille à Masdar city , « free-zone » d’Abu Dhabi, capitale fédérale des Émirats arabes unis. C’est ici qu’il a co-fondé sa start-up, ce qui pourrait paraître original. Ou littéralement disruptif.
Tu es parti quand ?
« Je suis parti le 5 décembre, ça fait pile 6 mois maintenant que je suis officiellement résident de l’émirat d’Abu Dhabi. »
Pourquoi Abu Dhabi ?
« Je suis parti là-bas pour monter une entreprise avec un business partner, un projet que j’avais depuis quelques années déjà. Le but de notre entreprise : développer des produits autour du « law enforcement », pour permettre de détecter actes de terrorisme ou autres, soit de manière pro-active soit de manière réactive. C’est un domaine sensible et secret, je ne peux en parler précisément, il y beaucoup de débats autour de ça, qui plus est en France actuellement… »
Ton avis sur cette question très aigüe ?
« Où est-ce qu’on met la limite, ce n’est pas moi qui pourrais le dire. Je dis juste que le monde n’est ni noir ni blanc, il est gris… Je sais bien ce que certains peuvent penser mais en même temps, je sais que ce que je fais vise à protéger au mieux la population… »
Et vous alors ? Que faites vous ?
« Dans ce domaine, le secret est roi mais une de notre différence est notre volonté de ne pas faire dans ce que l’on nomme la « mass surveillance » mais plutôt des outils pour les analystes au plus près du terrain, voire vraiment sur ce dernier. Le but du métier n’est pas de surveiller la vie privée de chacun mais de comprendre et agir au niveau des individus qui ne respectent pas les lois. »
Start-up et Abu Dhabi, ça rime ensemble ?
« Effectivement, quand on entend start-up, on entend San Francisco, New-York, pourquoi pas Paris aussi mais je voulais voyager, faire d’autres choses. Pour plus de challenge encore peut-être aussi… En tant qu’Ancien d’une école informatique, j’ai l’impression que notre « communauté tech » ne se rend pas compte de l’intérêt d’un pays comme les Émirats. Ce pays est un pays plein d’expatriés qui veulent faire carrière. Moi je viens du « dev’ » mais je sais aussi que ce n’est pas suffisant pour ma carrière. »
Pas suffisant… dans quel sens ?
« L’informatique est un outil parmi d’autres pour résoudre un besoin business et je pense que toute personne de notre domaine qui n’aura pas compris ça plafonnera un jour, malheureusement, même si elle est très compétente dans son domaine. Ce n’est pas moi qui ai inventé cette règle, c’est comme ça et c’est aussi pour cette raison que je suis parti. »
Peux-tu préciser ?
« J’ai été consultant pendant 5, 6 ans dans différentes entreprises liées plus ou moins à la data et aux interfaces utilisateurs. Dans cette fonction, il faut être capable de présenter un projet, de transmettre une idée, de construire un business plan, d’expliquer à quelqu’un pourquoi tel ou tel choix peut être intéressant ou pourquoi justement il ne faut pas faire ceci ou cela… »
Apprendre les codes économiques…
« À un moment, il faut comprendre un peu ces réalités business et de mon point de vue, monter une start-up à San Francisco, c’est très intéressant, j’ai failli le faire et je le ferai peut-être mais, à l’inverse, monter une entreprise au Moyen-Orient permet de comprendre beaucoup de choses nouvelles, avec un focus différent. Ce ne sont pas les mêmes profils que vous allez croiser, il faut s’adapter très vite. »
Un genre de darwinisme 2.0 ?
« C’est un environnement très « agressif » en un sens, je m’explique : on n’a pas le droit à l’erreur, beaucoup de gens veulent venir ici mais seuls les meilleurs profils sont retenus. C’est une autre approche et cela vaut pour ceux qui veulent développer leurs carrières dans le domaine informatique… »
On va plus loin ?
« C’est très différent de ce que l’on peut entendre et voir dans les journaux, télé, radio sur le monde des start-up et des nouvelles technologies mais en même temps, c’est un choix que je conseille aux gens qui voudraient aller un peu plus loin que juste le « buzz Silicon Valley »… »
Un exemple ?
« Masdar city est une ville qu’ils font pousser du désert, une ville totalement écologique, avec des panneaux solaires et ainsi de suite, tout ce qui concerne le développement durable. On est quasi indépendant de tout, totalement tourné vers l’avenir. Leur vision, c’est que si on est capable de monter une ville comme celle-ci dans un des pays les plus chauds au monde, cela veut dire qu’avec un peu de volonté, on peut le faire partout. Encore une fois, je ne dis pas que tout est parfait aux Émirats mais moi, j’y travaille tous les jours et c’est très agréable. »
C’est agréable comment ?
« J’aime bien comparer avec le fait de s’expatrier aux Etats-Unis, ce que font beaucoup d’Epitech… Aux USA, on reste dans un cadre occidental, on s’y fait facilement. Aux Émirats, un peu comme dans les pays asiatiques, c’est réellement une autre culture, une autre manière de vivre, une autre manière de socialiser, une autre manière tout simplement de s’organiser dans sa vie de tous les jours… C’est une autre mentalité. Si c’est mieux ou moins bien, je ne sais pas, c’est juste différent. Aujourd’hui ça fait 6 mois que je vis ici et je peux dire déjà que mon retour en France sera compliqué, honnêtement. »