La fête des fablabs #2
L’impression 3D, « 3D printing » en anglais, tout le monde en parle, moins nombreux sont ceux qui en maitrisent la technique. Les « makers » forment une communauté de passionnés qui cependant s’agrandit vite. À Rennes, les fablabs foisonnent au point que notamment Norbert Friant (responsable du service numérique Rennes Métropole) ou Fabrice Hesling, directeur pédagogique de l’école à Rennes et son adjoint, Guillaume Collet, se soient vivement impliqués dans la création du LabFab Étendu afin de réunir tous les fablabs de l’agglomération rennaise. Epitech Rennes en fait bien sûr partie et a organisé la deuxième édition de sa 3D Print Party samedi 28 janvier.
(© IDLV)
Giant Slick
La deuxième édition de cette 3D Print Party made in Epitech s’est déroulée sur le même format que l’année dernière à un exception notable, et pas n’importe laquelle. Dès l’entrée, les visiteurs « tombaient » sur une imprimante 3D « géante », une Slick venue directement des entrailles de l’EESAB (les « Beaux-Arts » de Rennes) qui ne dispose pas de toutes les compétences pour la remettre au point. « Elle était ce matin (samedi 28, ndr) presque de nouveau fonctionnelle, nos étudiants sont dessus, elle va très bientôt (re)marcher », rassure Guillaume Collet.
Percolation inter-promos
Répéter tous les ans cet événement sert aussi à installer « une tradition, explique Guillaume. C’est ce qui est en train de se mettre en place depuis 2 ans, surtout depuis la première 3D Print Party où on a fait venir les fablabs rennais ou de Saint Malo. Grâce à cet event où tout le monde ou presque est présent, les étudiants croisent les fabmanagers ou les gérants de ces lieux-là. Eux les invitent à des hackathons ou leurs propres événements et depuis, le « bruit » se propage dans les promos plus jeunes ».
Des exemples de percolation
« Et aujourd’hui, poursuit Guillaume, on a des première année qui vont travailler chez My Human Kit (MHK) le jeudi après-midi, de leur propre chef, par pur plaisir. L’un veut travailler sur une main bionique et l’autre veut découvrir les processeurs ARM pour coder dessus – et en allant là-bas, il a trouvé son bonheur… ».
Des Indiens dans la Ville
IDLV est un collectif d’artistes, designers, photographes etc. (en « résidence » à l’hôtel Pasteur) orienté sur les interventions plutôt numériques en milieu urbain. Ils étaient déjà à la 3D Print Party #1, pour montrer ce qu’ils faisaient avec leur RepRap, de même que leur « robot traceur mural ». Ils sont revenus cette année : « depuis un an, nous détaille Charly Gutierrez, un des co-fondateurs de ce collectif, on a envie de travailler sur la cartographie des usages de la ville. On a donc développé avec deux étudiants d’Epitech – Antoine Danibo et Quentin Quero (tous deux promo 2019) – un projet d’objets relais qui, pendant que l’on se déplace dans la ville, envoie nos coordonnées GPS à une machine qui dessine, qui « mappe » nos déplacements ». Et ils ont beaucoup d’autres projets…
Bespoke shirts
« On a aussi, reprend Fabrice, 6 étudiants de la promo 2021 – dont Pierre Roumane, Delphine Godet et Sylvain Touanen (photo ci-dessus) – qui travaillent avec Agathe Merkat, couturière de métier qui est, elle, basée aux Ateliers du Vent. Elle a comme projet de créer une machine pour tracer des patrons de chemises pour hommes, des chemises sur mesure, de façon beaucoup plus rapide qu’avant ». « On redimensionne les patrons », résume Delphine. « Agathe prend les mesures de la personne, nos étudiants fournissent le logiciel qui permet de les récupérer et d’adapter le patron correspondant, automatiquement. Et le père d’Agathe travaille sur une imprimante spéciale qui permettra de dessiner le patron ».
Fabhub
« Et puis, ajoute Fabrice, tous les mercredis après-midi, l’école est ouverte au public, pas tant du côté 3D print du fablab que du côté « bidouillage », qui fait d’ailleurs tout aussi bien partie de la culture fablab et ce, depuis le début du mouvement Makers. Les étudiants répondent aux interrogations autour de l’Arduino, du Raspberry Pi et ensuite, on met en place un atelier d’une heure ou deux au sein du Hub innovation de l’école. Les gens qui y viennent sont des gens qui ont envie de tester, de faire, des jeunes ou des personnes plus âgées ou des ingénieurs qui s’ennuient dans leurs jobs… En un mot, les curieux ».
Des conférences aussi
Fabrice Hesling et Guillaume Collet ont introduit une nouveauté cette année dans le cadre de leurs 3D Print Party : des conférences. La première, sur le « modeling » sur OnShape, a été animée par le fabmanager du fablab de l’université Rennes 1 (qui a accueilli rien moins que Richard Stallman ce 8 février…). Puis Axel Dubois de SLS France a présenté son activité, l’impression 3D métal, en lien avec les industries aéronautique et médical, en particulier l’impression métal de prothèses dentaires. Pour synthétiser, M. Dubois a mis les pieds dans le plat de certain prospectiviste, Jeremy Rifkin pour ne pas le nommer…
Un pavé dans la mare
« L’impression 3D peut constituer la base de la prochaine révolution industrielle mais pour l’instant, on n’y est pas… On n’atteint pas encore la précision du micron par exemple, d’où la nécessité parfois de passer ensuite la pièce à la fraiseuse numérique avec 5 tests à l’usinage, notamment dans la chirurgie maxillo-faciale (…) L’impression 3D ne rentre pas en concurrence avec l’usinage, c’est un complément. Quand on proclame que l’impression 3D va créer de l’emploi, c’est faux : une pièce imprimée en 3D ne devient intéressante uniquement quand elle a été pensée pour telle fonction précise… Son coût de revient étant linéaire, nous ne sommes pas en face du même modèle économique que dans l’industrie du monde d’avant. » Au moins, c’est dit.
Focus sur le projet Woodbox
Alexis Lina est un exemple type de cette percolation dont on vient de parler. On a déjà parlé de la Woodbox dont l’idée lui était venu au cours d’un hackathon organisé justement par le LabFab rennais. Aujourd’hui il n’est plus tout seul avec Adrien Schmouker (de la même promo 2019 qu’Alexis), Woodbox est devenu un Epitech Innovative Project qui réunit 10 membres de cette même promo. Ils vont donc concourir à FWD 2017 en mars prochain.
Maker Faire Nantes : turning point
Le projet a d’ailleurs évolué, Alexis nous explique le pourquoi du comment : « on se tourne aujourd’hui vers le particulier, à force d’entendre les mêmes feedbacks. On en a eu notamment beaucoup à la Maker Faire Nantes en juillet dernier. Cette Maker Faire, à laquelle nous avons participé grâce à Epitech, a été une super expérience pour nous, vraiment, les gens nous ont donnés plein de conseils ».
La School
« Du coup, précise-t-il, notre projet était mieux pensé quand nous avons postulé ensuite à La School de Guillaume Chevalier à Rennes, « l’école des intra- et entrepreneurs » qu’il a monté avec d’autres collaborateurs – Karine Sabatier et Laurent Morisset. On a même gagné le petit « concours d’entrée » où les projets sélectionnés gagnent le droit de suivre cette formation gratuitement ».
Lean Start-up
« La School est un programme de 10 sessions de cours du soir, pour apprendre à créer une start-up : définir son idée, comment on fait maturer cette idée, comment on trouve ses premiers clients, bref, tout le lean start-up et c’est extrêmement intéressant ».
Ça sert à quoi, la Woodbox
« Concrètement sur l’appli Woodbox, l’utilisateur va par exemple voir le taux d’humidité chez lui et dès qu’il y a un problème, il reçoit une alerte sous forme de notification, qui lui donne la raison puis la réponse à son souci. Grâce au forum woodbox que l’on avait mis en place, nous avons recueilli des métadonnées avec tous les gens qui y ont participé et grâce à cela, on trouve la meilleure solution possible pour cet utilisateur, avec des « tips » à chaque fois ».
Modularité
« Au départ il y avait 4 capteurs, on part maintenant sur une solution évolutive : le format planche n’existe plus, on part sur un format de type (wood)box centrale, packagée évidemment en bois. Avec elle, sont fournis ce qu’on appelle désormais non plus des capteurs mais des modules qui vont pouvoir être dispatchés dans toute la maison, reliés en réseau. De cette manière, les gens qui veulent n’avoir que des mesures de température n’auront que celles-ci ; s’ils veulent plein de capteurs différents dans tout leur foyer sans devoir percer des trous partout, pas de souci non plus… ».
Bootstrap et proto
« On en est là aujourd’hui, nous sommes en phase de re-prototypage, on refait nos modules, en gardant toujours ce même aspect ludique : un soleil pour la luminosité, un nuage pour l’humidité… avec toujours aussi ce même code couleurs vert – orange – rouge, que tout soit très compréhensible ». Comme on l’a déjà écrit, Woodbox n’est pas un projet « en bois », loin de là.