Eric Legale : « Il faut rappeler que l’usage doit primer avant tout »

Eric Legale, Directeur Général d’Issy Media, nous parle du besoin du marché du travail en profils à la fois techniques et orientés usage.

Est-ce que vous pouvez nous expliquer l’activité d’Issy Media ?

Issy Media est en charge de l’innovation et de la communication pour la ville d’Issy-les-Moulineaux. Nous agissons comme une agence de communication publique, et nous nous intéressons également aux questions liées à l’innovation, notamment au niveau numérique. Ce sont des enjeux importants pour la ville d’Issy-les-Moulineaux, en termes d’image et de marketing territorial.

La ville d’Issy-les-Moulineaux est connue et réputée pour son côté innovant, est-ce que vous pourriez nous donner des exemples de projets numériques que vous avez pu développer ?

Oui alors il y en a beaucoup ! Déjà, au préalable, j’aimerais souligner que le numérique dispose d’un effet de transformation sur la collectivité, comme c’est le cas pour l’entreprise. Le digital peut donc servir à transformer la ville, et à faire en sorte que ses habitants résident dans une ville plus moderne et plus agréable. La base de notre métier est de rendre service et de faciliter la vie des utilisateurs.

« Il est important de rappeler que l’usage doit primer avant tout, et que nous évitons à tout prix de faire des choix purement techniques. »

Pour revenir à quelques exemples sur la manière dont nous avons pu introduire le numérique dans notre ville :

· Le tableau noir dans nos écoles n’existe plus depuis des années.

· L’administration est dématérialisée au maximum de ce qui est autorisé par le juridique.

· Le système Pay by Phone, qui permet le paiement en ligne du stationnement automobile, a été lancé à Issy-les-Moulineaux il y a 10 ans. Aujourd’hui ce sont 200 villes en France qui utilisent ce système.

· Le dernier service innovant que nous avons lancé est une application pour les assistants vocaux, du type Google Home, Alexa d’Amazon etc. Nous pressentons que ces appareils-là vont massivement rentrer dans les foyers, car l’interaction vocale constitue le support de communication le plus naturel qui existe, et notamment pour les seniors, qui sont certes moins à l’aise avec les claviers ou les smartphones, mais pour lesquels la voix pourrait leur faciliter l’accès au numérique.

Vous dites vous opposer à une vision techniciste de la smart city, qu’est-ce que cela signifie ?

Au début lorsque l’on parlait de la smart city, c’était très abstrait et sous-entendait une ville assistée par ordinateurs. Ça pouvait être anxiogène, et surtout ça ne me semblait pas du tout crédible, de plaquer un dispositif technologique sur une ville. Mais cela a beaucoup changé, car de nombreuses collectivités ont souligné que cela ne faisait absolument pas partie de leur vision, qu’elles souhaitaient des avancées citoyennes, pragmatiques et orientées vers l’humain.

Vous avez une vision du digital résolument humaine et tournée vers l’utilisateur ; pour vous quels sont les bonnes compétences pour faire de la transformation digitale aujourd’hui ?

Ce qui compte le plus c’est l’esprit d’ouverture : ne pas s’interdire quoi que ce soit. On entend souvent « Ça ne marchera jamais. » et pour moi c’est à bannir, surtout dans le monde du digital, où tout ou presque est possible. L’agilité, la capacité d’autonomie dans le travail, sont aussi des qualités nécessaires pour évoluer positivement dans ce domaine. La personnalité et l’envie priment selon moi sur les compétences, notamment techniques.

Epitech Digital a vocation à former des profils transverses, qui maîtrisent donc à la fois des compétences techniques mais aussi comprennent les différents métiers et se montrent capables d’apprendre à apprendre (ce que l’on appelle les softs skills). Est-ce que ces profils vous semblent difficiles à trouver ?

Oui, c’est évident que l’on a du mal à trouver ce type de profils, car le monde du travail reste encore très siloté. Aujourd’hui lorsque l’on rencontre des ingénieurs, ils montrent encore évidemment un réel esprit ingénieur. Ils sont très peu orientés usage ce qui peut engendrer de véritables difficultés. A l’inverse, lorsque l’on fait face à des profils plus métiers mais qui ne sont pas forcément techniques, ils vont rapidement mettre en avant ce manque de technique comme point de blocage pour ne pas avancer. Ainsi, avoir la possibilité de recruter plus de profils mixtes et des moutons à cinq pattes permettrait sans aucun doute de faire avancer plus vite des projets digitaux.

« On a besoin de gens qui comprennent comment ça marche, et pas nécessairement qui savent comment faire marcher. »

En mot de la fin, auriez-vous un conseil à donner à un jeune qui se lance sur le marché du travail dans l’innovation ?

Un jeune qui veut innover doit d’abord se poser la question de quel problème il doit résoudre, pour être capable ensuite de déterminer au mieux quelle solution il pourra apporter.

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